Le déclic. Un son sec, métallique. Une fraction de seconde, et la lumière se fige sur la pellicule. Le moment existe, gravé à jamais. David Dreger a dix ans lorsqu’il découvre cet appareil photo argentique que son père garde précieusement. Il ne comprend pas encore l’importance de cet objet, mais il ressent une chose étrange, une attraction inexpliquée. L’enfant observe, fasciné, les diapositives glisser entre les doigts de son père. Il ne le sait pas encore, mais son cerveau imprime chaque détail, chaque geste, chaque silence. L’image devient une mémoire, un écho qui résonnera plus tard. Puis la vie suit son cours. L’histoire s’endort, mais elle n’est pas oubliée.


Les années passent et l’image disparaît sous les impératifs rationnels. Un bac en gestion, un master en administration, une carrière dans l’audit interne. David apprend à voir le monde autrement, à le structurer, à l’analyser, à en évaluer les risques et les incohérences. L’œil devient celui du contrôle, de la logique, de l’ordre. Mais quelque chose résiste. Une part de lui s’attarde sur les détails invisibles, sur les visages, sur les atmosphères. Dans son esprit, les scènes se composent instinctivement, mais il ne les capture pas encore. L’image sommeille, prête à renaître.


Un jour, presque par hasard, il ressort l’appareil pour photographier ses proches. Le geste est naturel, comme s’il avait toujours été là. Il retrouve la sensation, l’intuition du cadre, de la lumière. Il redécouvre ce que son père lui avait laissé en héritage sans le dire. Alors, il achète son premier appareil numérique et tout s’accélère. L’œil s’adapte, l’obsession commence. Il explore les visages, traque l’ombre et la lumière, cherche l’émotion brute. Il étudie Newton, Lindbergh, Sieff, Doisneau. Il apprend leur langage, leurs codes, et peu à peu, il façonne le sien.


Quatre ans passent, entre errance et création, entre France et ailleurs. Il photographie, il compose, il cherche encore. Jusqu’au jour où tout prend sens. Une exposition, un fil rouge, une intention. « Premières Indiscrétions », un regard sur la féminité, sur la beauté plurielle. Lorsque les images sont accrochées, lorsqu’il voit ses muses prendre vie sous le regard des autres, il comprend qu’il ne pourra plus revenir en arrière. L’image n’est plus un à-côté, elle est devenue son langage, sa respiration.


Depuis, il parcourt le monde, capte la singularité de chaque culture, fige des instants qui ne se répéteront jamais. Amérique du Sud, États-Unis, Afrique, Europe, son œil s’imprègne de ce que les mots ne peuvent dire. Un projet après l’autre, une exposition après l’autre, un livre après l’autre. « Garçonne » interroge l’androgynie, « Un Voyage Sacré » raconte le Pérou, « Whispers » murmure l’Équateur, « Shades » dessine New York, et bientôt, « Nos Caminhos Da Lusitania » révélera le Portugal. Chaque projet est une pièce supplémentaire d’un puzzle qu’il ne finira jamais totalement. Parce que l’image est mouvement, parce qu’elle est une mémoire en construction, parce qu’elle est ce que l’on ne peut dire autrement.


Aujourd’hui, installé au Tréport, il prépare son troisième voyage en Amérique du Sud. Il sait que chaque voyage le transformera autant qu’il transformera son regard. Il sait que l’image continuera de l’appeler, toujours. Parce que ce n’est pas lui qui l’a choisie, c’est elle qui l’a trouvé.


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The click. A sharp, metallic sound. A fraction of a second, and the light freezes onto the film. The moment exists, etched forever. David Dreger was ten years old when he discovered the analog camera his father kept so carefully. He didn’t yet understand the significance of the object, but he felt something strange, an unexplainable pull. The child watched, fascinated, as the slides slipped through his father’s fingers. He didn’t know it then, but his brain was recording every detail, every movement, every silence. The image became a memory, an echo that would later resurface. Then life carried on. The story went dormant, but it was never forgotten.


Years passed, and images faded beneath the weight of rational choices. A degree in management, a master’s in administration, a career in internal auditing. David learned to see the world differently—to structure it, analyze it, assess risks and inconsistencies. His gaze became one of control, logic, and order. But something resisted. A part of him lingered on invisible details, on faces, on atmospheres. In his mind, scenes composed themselves instinctively, but he had yet to capture them. The image lay dormant, waiting to be reborn.


One day, almost by chance, he picked up a camera to photograph his loved ones. The gesture felt natural, as if it had always been there. He rediscovered the sensation, the intuition of framing and light. He found again what his father had passed on to him without words. So, he bought his first digital camera, and everything accelerated. His eye adapted, obsession took hold. He explored faces, traced shadows and light, searched for raw emotion. He studied Newton, Lindbergh, Sieff, Doisneau. He learned their language, their codes, and gradually, he shaped his own.


Four years passed, between wandering and creating, between France and elsewhere. He photographed, composed, and kept searching. Until the day everything made sense. An exhibition, a guiding thread, an intention. Premières Indiscrétions, a vision of femininity, of diverse beauty. When the images were displayed, when he saw his muses come to life under the gaze of others, he understood that there was no turning back. Photography was no longer a side pursuit; it had become his language, his breath.


Since then, he has traveled the world, capturing the uniqueness of each culture, freezing moments that will never repeat themselves. South America, the United States, Africa, Europe—his eye absorbs what words cannot express. One project after another, one exhibition after another, one book after another. Garçonne explores androgyny, Un Voyage Sacré tells the story of Peru, Whispers whispers of Ecuador, Shades paints New York, and soon, Nos Caminhos Da Lusitania will reveal Portugal. Each project is another piece in a puzzle he will never fully complete. Because the image is movement, because it is memory in the making, because it captures what cannot be said otherwise.


Now settled in Tréport, he is preparing for his third journey to South America. He knows that each trip will change him as much as it will refine his gaze. He knows that the image will continue to call him, always. Because it wasn’t him who chose photography—it was photography that found him.

davidlysblanc@gmail.com

Tel - +33-6-14-47-21-61

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